Cela vous paraît tout ce qu’il y a de plus normal aujourd’hui de trier papiers et cartons mais ce n’était pas le cas il y a une dizaine d’années. On s’habitue vite !
Au total, nous en trions plus de 80 % (le reste finit en décharge ou en incinérateur). Pourtant, avant 2007, seuls les déchets d’imprimerie étaient collectés. Aujourd’hui, entreprises et ménages trient, les ménages apportant moins de 20 % de la ressource (données 2015)1. C’est le deuxième tonnage de matière collectée en France (derrière les ferrailles, qui pèsent lourd, de base !). La fibre de cellulose recyclée représente même 66 % de la matière utilisée par l’industrie papetière française, ce qui en fait l’une des premières industries du recyclage dans l’Hexagone et parmi les premières dans le monde. Car ce marché est mondial. Ce qui influence le prix de la matière recyclée, dès lors très fluctuant. Il faut dire que le papier-carton est un déchet qui voyage bien. À une époque, on en remplissait même les navires repartant en Asie… juste pour les stabiliser.
On sait recycler papiers et cartons depuis le XIe siècle a priori (au Japon), et de façon industrielle depuis 1690 (à Philadelphie). On considère aujourd’hui que la production de papier recyclé consomme entre deux et cinq fois moins d’énergie et d’eau que la production de pâte vierge. Mais à la différence du verre, le papier ne se recycle pas indéfiniment. Les fibres de cellulose s’abîment et raccourcissent à chaque recyclage. En pratique, elles ne peuvent être recyclées que cinq à sept fois.
Cette immense variété de déchets est globalement répartie en trois catégories dans les centres de tri : les « belles sortes », bien blanches, les « moyennes sortes » (journaux et magazines) et les « basses sortes » (emballages) encore hiérarchisées en plusieurs dizaines de qualités différentes ! La suite — le recyclage à proprement parler — se passe dans l’industrie papetière. C’est le même processus que celui que nous avons expérimenté enfant en faisant du « papier mâché » : papiers et cartons sont brassés dans un énorme mixeur avec de l’eau pour être réduits en pulpe. Puis on élimine colle, vernis, agrafes, spirales, ficelle, matières plastiques et encres grâce à divers processus de tamisage, séparation, désencrage…
Cette boucle de nettoyage peut être répétée jusqu’à quatre fois. Vient ensuite éventuellement le blanchiment, aujourd’hui réalisé à partir d’eau oxygénée et d’hydrosulfite de soude, avec des impacts bien plus limités que le chlore utilisé auparavant. Cette nouvelle matière est déposée sur une toile en mouvement où elle s’égoutte pour former une feuille qui sera pressée et séchée sur des cylindres chauffés. Les papiers recyclés actuels peuvent être de même qualité que le papier issu de pâte vierge, le recyclage étant d’autant plus vertueux que le papier a été écoconçu, avec des encres qui se séparent facilement ou des colles qui encrassent peu les machines.
En quoi sont recyclés ces papiers et cartons ? En carton d’emballages et de conditionnement (fabriqués à plus de 90 % avec de la pulpe recyclée), en papier journal (à plus de 80 %), en divers papiers ou en papier hygiénique (serviettes, papier toilette, etc.). Cette ouate de cellulose a aussi des propriétés isolantes. Une fois traitée contre le feu, elle peut tapisser l’intérieur de la toiture ou des cloisons de votre maison. Et de nouveaux produits voient le jour chaque année comme ces cloisons en carton Ipac®. Une maison en carton… À quand l’escalier en papier ?
1 En 2016, selon une enquête d’Écofolio, les bons trieurs ont plus de 55 ans. Parmi leurs signes distinctifs : ils se déplacent plutôt à pied ou en vélo, achètent des légumes locaux et de saison, des produits bio, disent voter et aiment lire. Et vous ?
Cet extrait est issu de l'ouvrage :