Recouvert de fourrure, l’ornithorynque pond des œufs et la femelle allaite les jeunes. Avec son bec, pourvu de mécanorécepteurs et d’électrorécepteurs, il localise les invertébrés dont il se nourrit. Et, autre étrangeté de cette « exception biologique » : le mâle est venimeux ! Il porte sur chaque patte arrière un éperon pointu long de 1,5 cm, légèrement recourbé et kératinisé. Ces ergots sont creux et reliés par un conduit à une glande à venin, dite « crurale », située dans la cuisse. Les mâles et les femelles naissent avec des éperons, mais ces dernières les perdent au cours de la première année. Les mâles utilisent leurs éperons pour injecter du venin comme arme offensive et pour affirmer leur domination sur d’autres mâles, se disputer avec des partenaires et pour des territoires. Il s’agit donc presque exclusivement de compétition intraspécifique. Ils peuvent aussi utiliser leur venin comme arme défensive contre les prédateurs.

Lors de l’attaque, les pattes arrière enserrent la victime avec une force considérable, de sorte que les éperons s’enfoncent dans sa chair. Quelques millilitres de venin sont injectés par piqûres répétitives. Les glandes crurales présentent une activité cyclique. Pendant la saison de reproduction, elles grossissent et leur production de venin augmente ; en dehors de cette saison, elles régressent. Peu d’animaux, à part l’ornithorynque, utilisent le venin pour la compétition. La douleur infligée par l’ornithorynque est atroce, suivie d’un gonflement immédiat.

Non mortel pour les humains, son venin peut pourtant tuer des animaux, comme des chiens, si ces derniers les attaquent. Les douleurs ne sont pas atténuées par la morphine et nécessitent une anesthésie, associée à une perfusion de narcotiques. Les bloqueurs nerveux doivent plutôt être utilisés pour soulager la douleur, ce qui suggère que le venin d’ornithorynque peut contenir des composés qui pourraient être cliniquement utiles. Bien que les éperons et le venin aient pu avoir une fonction défensive dans l’histoire de l’évolution, comme cela a été supposé pour des mammifères du Mésozoïque, l’ornithorynque a actuellement peu de prédateurs indigènes connus. Seuls quelques mammifères actuels produisent du venin, par exemple de la salive venimeuse chez certaines musaraignes et les solénodons.